S'asseoir sur le petit banc deux places. A cette heure-là, il y en a toujours un de libre, même si c'est un peu plus loin.
Poser ma sacoche pleine d'ordinateur et paperasse.
Enlever mon sac à dos.
a un moment donné, au-dessus de la courbe
Fermer le parapluie dégoulinant et le poser à mes pieds en me demandant si je vais l'oublier en sortant.
Ouvrir mon sac sortir ma trousse (eh oui, à mon âge, j'ai encore une trousse, même qu'elle est en tissu rouge type chinois, comme la précédente, comme celle qui la remplacera si ça se trouve) sortir mon stylo de ma trousse.
je suis légitime, moi
Me rendre compte qu'avec les gants ça ne va pas être possible.
Enlever mes gants hésiter entre les mettre dans mon sac et dans mes poches.
En profiter pour ouvrir mon manteau afin d'éviter l'étouffement ou le coup de chaud sur le trajet - l'expérience ça compte.
non, tu peux pas mettre ça, c'est pour avoir les subventions ?
Chercher mon carnet dans mon sac sans regarder, simple défi personnel. Ah non ça c'est un dossier ah non un agenda, 2020 ou 2021 ? Je me traîne encore tout le mois de janvier l'agenda de l'année précédente parce qu'il détient bien entendu tout un tas d'informations vitales.
nous, on pense juste les accueillir une matinée pendant la résidence et c'est tout, on va pas faire des stages handicapés toute la semaine
Changer d'agenda, d'année, la nouvelle année, est-ce que ça veut encore dire quelque chose ? Déjà qu'avant, mon unique résolution de chaque nouvelle année était de ne pas prendre de résolution, alors là... à part hiberner (qui est à peu de choses près ce qui va nous arriver), je ne vois pas d'autre résolution qui tienne. La nouvelle année... On vous la souhaite bien bonne ! Et la santé surtout ! Mais santé ou pas, souhaiter la bonne année en 2021 relève plus de l'anachronisme qu'autre chose.
non, tu peux pas mettre ça, on pourrait avoir des contrôles
Ah non ça c'est mon livre, ça mon téléphone, merde j'ai oublié d'allumer tous anticovid (tous unis contre la vie covid ? dégage covid ? covid bouté hors du monde ? c'est quoi le nom de cette appli déjà ? ils ne l'ont pas changé en cours de route parce que la première n'avait pas un nom assez sexy ?) C'est pas vraiment par conviction mais tant qu'à faire que l'appli prenne de la mémoire sur mon téléphone qui en a à peine plus que moi, autant l'allumer, surtout dans les transports où elle aurait davantage l'occasion de remplir sa fonction qu'à la maison. Bon, je verrai ça plus tard.
Toujours impossible de mettre la main sur mon carnet, ah non ça c'est encore mon livre.
Je me résous à utiliser mes yeux pour abréger cette recherche. Pif paf pouf, c'est vite vu, parmi tout ce fouchtra, pas le moindre petit carnet. L'ai-je laissé à la maison ce matin, ou au bureau en repartant, s'est-il glissé entre des dossiers que j'ai fini par laisser sur place après les avoir trimballés de la maison au bureau et retour au moins 5 ou 6 fois pour rien, etc.
ah bon ben je te le refais tout de suite
Tiens, un mec qui lit. Ah non, il ne lit pas, il a un livre posé sur les genoux et regarde autour de lui. Je m'acharne à essayer de déchiffrer le titre ou l'auteur. Impossible. D'ailleurs, le lecteur distrait finit par ranger son ouvrage. Voilà.
Bon, je vais me rabattre sur un article - mon bouquin mérite de meilleures dispositions. L'idée est de résister à instagram qui est fort divertissant mais pique la place aux livres et à l'écriture. Déjà qu'il ne leur en restait pas tant que ça.
Oh, un mec avec un énorme livre... fermé sur ses genoux et qu'il utilise d'appui-avant-bras pour feuilleter plus confortablement son téléphone.
Le livre sur les genoux is the new je suis un grand lecteur.
Nan, j'suis pas rabat-joie, nan j'suis pas old school.
Je remise le stylo dans sa trousse dans son sac et ouvre la sacoche à ordi pour y récupérer le fameux article " Efficacité de thérapies cognitives et cognitivo-linguistiques sur les activités de la vie quotidienne et sur la qualité de vie de personnes présentant une maladie d'Alzheimer : une revue de littérature" de Sophie CHESNEAU et Myriam VENNE. Et là, surprise, ma main tombe sur le carnet.
tu me prends pour qui ?
Tout s'explique donc, il n'était pas dans le sac à dos mais dans la sacoche à ordi. Sauf que maintenant, je ne sais plus quoi faire.
Le doute me ronge, il se faufile, le fourbe, à la moindre occasion. Carnet ou article, article ou carnet ? A cette heure-ci, mes facultés d'adaptation sont plus que limitées, pour ainsi dire réduites à l'état de résidus. Après tout un effort psychique pour accepter de renoncer au carnet, je me vois désormais contrainte de faire un choix. Beurk un choix.
Allez carnet, j'ai déjà perdu 5 stations d'écriture mais comme il m'en reste 22... Heureusement que je n'avais pas remis mes gants. Par contre, re-sac, re-trousse, re-stylo. Top départ.
On n'est pas bien là, à écrire dans le métro ?
Oh non ! Où sont mes lunettes ?
....
Postface : dans la série Alzheimer, je dédie ce post à une dame de 80 ans - je dis bien 80 ans - eue au téléphone il y a 3 jours parce que son médecin lui avait conseillé de l'orthophonie. Elle a des petits vaisseaux qui pètent dans le cerveau et se rend compte qu'elle "COMMENCE à oublier des petites choses de temps en temps"... De qui se moque-t-on ?
Postface le retour : les phrases en italique correspondent à des propos entendus sous terre.
Des nouvelles (anciennes) du blog :
Où il était déjà question de mémoire.
Où il était déjà question de handicap (mais pas au téléphone).
Liste d'inauguration 2021 :
GAUZ Black Manoo
Si vous avez lu et aimé Debout-Payé du même auteur, vous ne serez pas déçu par Black Manoo. Si vous n'avez jamais lu GAUZ, il est temps de vous y mettre.
Un extrait ?
Marie-George et Sidik forment un redoutable tandem de gauchistes qui n’hésitent pas à prêcher les vertus du service public dont elles sont des ayatollahs. Elles le défendent en préparant les médicaments de la chimiothérapie. Le protocole est long et scrupuleux. Black Manoo a le temps de les écouter mono-dialoguer. Elles parlent comme une seule personne.
— L’hôpital, c’est un autre pays. Il a été créé par le régime général. Nous on l’appelle Union des Républiques Sociales Soignantes, URSS !
Le vin en 50 questions
L'or du paradis
Frantz FANON Peaux noires masques blancs
Janvier
Anne SERRE Au cœur d'un été tout en or
Pour les amateurs et amatrices de nouvelles.
Un extrait ?
Lorsque nous avons consenti à nous réveiller et sommes à la cuisine en train de prendre notre petit déjeuner, m'a dit Lottie, nous nous racontons nos rêves. Il paraît qu'il y a des gens que cela ennuie ; ce n'est pas du tout notre cas. Bien au contraire, m'a dit Lottie, c'est lorsque les gens racontent des choses qui ne ressemblent pas du tout à des récits de rêves que cela m'ennuie. J'aime le moment où le rêve commence à s'échapper, car c'est la règle, comme tout le monde le sait : la parole le fait fuir. Il se défait comme un chapiteau qu'on démonte, il s'évanouit comme une apparition qui s'en va, il était énorme et il n'en reste presque rien : un bout de scène, un détail du décor.
FABCARO Le discours
Erri De LUCA Tu, mio
Hervé Le TELLIER L'anomalie
JENSEN
Julia CHAPMAN Rendez-vous avec la ruse
Yaëlle SIBONY-MALPERTU Se défaire du traumatisme
Hervé Le TELLIER L'anomalie
Bernard FAUCONNIER Cézanne Biographie
Véronique MOUGIN
Virginie DESPENTES King Kong Théorie
Franz KAFKA Lettres à Milena
Laurent GAUDÉ
Karen CLEVELAND Toute la vérité
Christophe GAVAT Cap canaille
Un énorme guide touristique France
SAPROWSKI ??? (non trouvé...)
La folle enquête de Stieg LARSSON
Un livre en cyrillique
Chambre 507
Ken FOLLETT
Tropic of cancer (plutôt rare de croiser Henry MILLER dans le Métro!)
Edward KELSEY MOORE
VUONG Un bref instant de splendeur
La femme révélée
Michel PASTOUREAU Noir
PRATCHETT
David FOENKINOS Deux sœurs
Jane AUSTEN Orgueil et préjugés
Et le gagnant est... Hervé LE LETTIER ! (cherchez l'amonalie)
#etc.
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