Il y a moultes techniques et moultes passagers (que je nommerai "ceux" pour plus de commodité bien que, soyez-en assurés, je ne dédaigne aucunement la place des femmes dans ces descriptions ; elles aussi prennent le métro mais la langue française est ainsi faite depuis une décision des cadors de l'Académie au XVIIème qu'elles perdent ici en visibilité) :
Il y a ceux qui regardent leurs pieds en s'asseyant en speed sur une place qui vient de se libérer pour éviter de croiser le regard de ceux qui restent debout et auraient bien voulu, eux aussi, s'asseoir.
Il y a ceux qui fixent leur téléphone pour être sûr de ne pas voir la personne un peu âgée ou la femme enceinte qui se tient debout, là, juste devant. (Certains ne s'embarrassent même pas de cette technique qui, pourtant, fait ses preuves chaque jour et regardent dans les yeux la femme enceinte ou la petite mamie sans ressentir apparemment la moindre gène.)
Il y a ceux qui entrent dans le métro en tornade et cherchent à tout prix une place comme s'ils ne s'étaient pas assis depuis 15 jours. (Certains ont peut-être fait le service toute la journée ou exercent effectivement un métier debout, mais je doute que ce soit une majorité.)
Il y a ceux qui viennent se coller à vous, limite vous marcher dessus, parce que c'est là qu'ils veulent être (souvent contre la porte du fond ou entre les fauteuils pour ne pas perdre une place qui se libérerait) alors qu'il y a de l'espace ailleurs.
Il y a ceux qui ouvrent la porte avec leur avant-bras car ils ont trop peur d'attraper la peste (ou la crotte de nez d'autrui). Les mêmes en général ne tiennent pas les rampes et manquent se casser la gueule 15 fois par trajet afin de ne pas être contaminés.
Il y a ceux qui tournent ostensiblement la tête, souvent en faisant une petite grimace à l'attention du voisinage supposé complice, car ils ne supportent pas l'odeur des autres en été.
Il y a ceux qui hurlent sur leur môme de se "TENIR SINON TU VAS TOMBER!" comme s'ils étaient dans un Rafale prêt à décoller.
Il y a ceux qui s'agitent partout avec leur(s) môme(s) à la main dans l'espoir que quelqu'un se lève pour laisser une place, ce qui généralement ne fonctionne pas.
Il y a ceux qui considèrent que les enfants, du moins à partir d'un certain âge, peuvent bien rester debout (suivez mon regard).
Comme dit ce jeune homme qui fait la manche, il y a ceux qui se mettent à dormir instantanément quand il entre dans la rame avec sa guitare, même s'ils sont debout.
Il y a ceux prêts à se faire écrabouiller par les portes qui se ferment pourvu de ne pas avoir à attendre 3 minutes la prochaine rame.
Il y a ceux qui restent devant la porte ouverte, coûte que coûte, alors que tout le monde descend.
Il y a ceux qui soufflent comme des veaux dès que le métro s'arrête entre deux stations.
Il y a ceux qui reprochent à Mme B. de gêner tout le monde (descendre les escaliers à contre-courant, se tenir à gauche dans les escalators, s'asseoir sur un strapontin quand il y a du monde) alors qu'elle est hémiplégique et ne peut utiliser que sa main gauche. (Eh ouais les gars, le métro, c'est aussi pour les handicapés! Confer post "La différence" du 9 septembre.)
Mais il y a aussi ceux qui font un sourire quand ils croisent un regard, ceux qui se lèvent pour laisser la place (à une femme qui souvent s'exclame "ah bon, j'ai l'air si vieille…?"), ceux qui lisent (l'expérience montre que ce sont souvent les mêmes), ceux qui hurlent en parlant au téléphone (ah bon, ils ne devraient pas être là ceux-là?), ceux dont vous entendez la musique qu'ils écoutent, ceux qui profitent du trajet pour dormir, ceux qui cherchent à voir ce que les gens lisent.
Notons que les "ceux" de la première catégorie peuvent se retrouver par mégarde et selon les jours dans la seconde, et inversement, car personne n'est jamais toujours le même "ceux". Certains répondent d'ailleurs à plusieurs critères, parfois contradictoires entre eux. Par ailleurs, il existe tout un tas d'autres us et coutumes du métro dont il n'est pas question ici car il serait trop fastidieux - et déprimant - de les recenser de façon exhaustive. Suite donc dans un prochain épisode.
Post-scriptum : pour celles et ceux que la question intéresse, vous pouvez lire cette interview linguistiquement accessible d'Eliane VIENNOT sur le genre dans la grammaire française.
Également à écouter sur "Les chemins de la philosophie" d'Adèle Van REETH, Bernard CERQUIGLINI tente de répondre à la question suivante : La langue a-t-elle un sexe?
Semaine du 5 au 11 novembre, pendant qu'il y en a qui sont prêts à s'étriper pour une raison ou une autre, il y en a d'autres qui lisent :
Des revues : Zi Economist, 59
Elena FERRANTE Celle qui fuit et celle qui reste
Stephen KING Christine
Julian BARNES La seule histoire
INDRIDALSON
Maurice DENUZIÈRE Montvert-les bains
Anne TUFFIGO Ces âmes qui guident nos pas
L'Empire ultime
Stéphane ALLIX Après
Yukio MISHIMA Le Pavillon d'Or
???? Baby
Un homme sort le même carnet que celui que j'ai dans mon sac. Ah non, 2, un gris et un beige. Une page contient une liste de questions, une autre des schémas, une 3ème un post-it bleu. Il a une belle écriture et maîtrise l'espace sur les feuilles sans lignes. Est-ce qu'il me regarde écrire maintenant ?
3 lectures non identifiées et 6 autres au long du trajet.
The software craftman (???)
Ohhh, un livre que j'ai lu très jeune et que j'avais beaucoup aimé (sans pour autant m'en souvenir je dois avouer…) :
Daniel PICOULY Le champ de personne
Mémoires d'une geisha
Harlan COBEN
Sapiens
Ayn RAND Objectifs épistémiques
Dan BROWN Origine
So much things to say (bio de Bob Marley)
Un livre de psaumes
Outlander
Glacé
Barack OBAMA Dreams from My Father
Abdelattif LAÂBI Le fond de la jarre
Et la Bande Originale de la semaine est donc un titre du grand, du seul, l'unique Bob !
A écouter pour un trajet agréable si jamais vous ne lisez pas, ou si vous êtes capables de faire les deux en même temps.
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